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Section clinique de Bruxelles - Programme 2024-2025

Variétés de l’acte

Acte manqué, acting out, passage à l’acte, l’acte analytique

L’acte ne concerne pas nécessairement la clinique. Nous avons été témoins récemment de l’enjeu qu’il peut avoir en politique^[1]. D’autres incidences  de l’acte se trouvent dans le champs de l’éthique. Orientée par la devise de Lacan selon laquelle « l’erreur de bonne foi est de toutes la plus impardonnable »^[2], l’éthique des conséquences fonde la valeur de l’acte en psychanalyse. Une fois que l’hypothèse de l’inconscient est posée, les bonnes intentions deviennent suspectes. C’est de ses conséquences que l’acte se juge^[3].

L’acte se rapporte à la clinique à partir du moment où nous considérons, grâce à la psychanalyse, que l’homme ne veut pas son bien et que c’est la jouissance qui détermine son action. Une fois cet axiome admis, l’irrationalité de l’action de l’homme n’a plus rien d’étonnant. Sa résistance aux calculs préalables à l’acte et aux illusions managériales devient évidente^[4].

Poussant ce point à son point extrême, Lacan dira que l’acte le plus réussi est le suicide. Dès lors, il dégagera le concept de l’acte à partir de celui de passage à l’acte^[5]. Celui-ci, faisant le quotidien d’un grand nombre de cliniciens travaillant en institution, porte en son sein la tendance humaine à l’autodestruction. Un individu qui passe à l’acte disparait en tant que sujet et se sépare radicalement de l’Autre, ce qui se manifeste, de façon plus ou moins grave, par une chute du lien social .

Nous pouvons nous réjouir de ce que le plus souvent, l’acte ne réussit pas, il est plutôt raté. C’est ce qu’on nomme l’acte manqué. Notons que l’acte manqué ou le lapsus n’ont de sens que si nous faisons l’hypothèse de l’inconscient, c’est-à-dire, si ne considérons que le ratage « veut dire quelque chose ». Sans cette hypothèse, l’acte manqué se réduit à une erreur qu’aucun je ne prend à sa charge. A la différence du sujet qui passe à l’acte à partir d’un point de certitude qui court-circuite l’inconscient, le sujet de l’acte manqué est divisé entre les intentions de son geste et la vérité inconsciente qui est venue l’entraver. 

Si le passage à l’acte fait fi de l’Autre, l’acting out est une adresse à l’Autre, le plus souvent incarnée par un psychanalyste. A l’instar de l’acte manqué, cet acte part du sujet de l’inconscient et en tant que tel c’est un message qui appelle l’interprétation. Mais surtout, il a comme visée de faire entendre à l’Autre ce qui, de la parole, ce dernier n’a pas pu entendre.

Pour terminer, l’acte psychanalytique n’est pas véhiculer par le sujet de l’inconscient ni par le narcissisme du moi. Son agent est plutôt un sujet de la certitude condensé dans une position d’objet. En cela, il est proche du passage à l’acte. Mais à la différence de ce dernier c’est un acte de parole qui est de l’ordre performatif, créateur d’une réalité nouvelle. Il s’agit d’une parole après laquelle les choses ne sont plus comme avant. Le sujet ancienne version disparait pour donner place à la naissance d’un sujet nouveau. Sans cet acte, une psychanalyse ne serait qu’une élucubration sans effet. Ici le paradigme est le passage de l’analysant à l’analyste qui se produit à la fin d’une analyse.

Gil Caroz